La Neuropathie Diabétique par le Dr Herbreteau – Service de Neurologie Centre Hospitalier de Bretagne Sud - LORIENT

Généralités
La neuropathie diabétique est une maladie des nerfs périphériques ou troncs nerveux (cerveau, moelle épinière) aux muscles, à la peau, aux organes internes. Les troncs nerveux sont comparables à des câbles électriques qui transmettent, qui véhiculent les influx nerveux.
Il existe trois sortes de nerfs périphériques :
● Les nerfs moteurs: transmettent aux muscles les ordres provenant des centres nerveux
● Les nerfs sensitifs: transmettent le sens du toucher, de la douleur, de la chaleur ou du froid provenant de la peau vers les centres nerveux
● Les nerfs qui commandent en permanence les organes internes (commande inconsciente de l’intestin, du cœur, de la vessie, des artères, des glandes qui fabriquent la sueur…). On appelle ses nerfs, les nerfs végétatifs.
Dans la neuropathie diabétique ce sont le plus souvent les nerfs sensitifs et les nerfs végétatifs qui sont touchés, les nerfs moteurs sont plus rarement atteints.

Fréquence
La fréquence augmente avec l’ancienneté du diabète atteignant environ 15% après 20 ans d’évolution.
Il faut aussi savoir
- Que les formes sévères sont rares moins de 5% des cas
- Que les formes «minimes» sont en revanche beaucoup plus fréquentes (petites anomalies à l’examen du spécialiste)
- Que la neuropathie fait découvrir dans certain cas le diabète.

Mécanisme
Le mécanisme est inconnu.
Cependant il est bien établi que plus le diabète est mal contrôlé, plus la neuropathie a des chances de se développer.
Il semble que l’excès de sucre dans le sang entraînerait la formation de sucres-déchets toxiques (sorbitol) qui empêcheraient le fonctionnement normal du nerf.
Un autre mécanisme possible plus rare est l’obstruction d’un micro vaisseau empêchant l’irrigation d’un tronc nerveux (micro-angiopathie…) et conduisant à la paralysie brutale de ce nerf.
Enfin certains chercheurs ont trouvé des anticorps fixés sur les troncs nerveux et les empêchant de fonctionner (auto-anticorps fabriqués par le patient lui même et comparable à ceux qui détruisent les cellules fabriquant l’insuline). Ce dernier mécanisme est probablement très rare.

Différentes variétés de neuropathie
A – Neuropathie sensitive
C’est la variété la plus fréquente correspondant à une atteinte des nerfs sensitifs bilatérale et symétrique. On parle quelquefois de «polynévrite»
Les symptômes touchent d’abord les extrémités des membres inférieurs (pieds, jambes) puis remontent jusqu’aux genoux et peuvent alors toucher aussi les mains.
Ce sont des douleurs (brûlures, crampes) souvent la nuit. Des picotements comme des fourmis dans les pieds, des engourdissements.
Mais parfois, le patient ne se plaint de rien, et c’est l’examen systématique du médecin qui met en évidence la neuropathie. Ces formes non douloureuses peuvent être ignorées et risquent alors de ne se révéler que par des maux perforants plantaires, favorisés par des blessures fréquentes liées à la perte de sensibilité des pieds.
Il faut savoir qu’avoir des douleurs dans les jambes ne signifie pas forcément avoir une neuropathie, d’autres causes de douleurs sont possibles :
- Douleurs des mollets survenant à la marche liées à l’artérite (doppler).
- Douleurs banales (arthrose)…
Comment mettre en évidence la neuropathie sensitive?
- En vérifiant la sensibilité des pieds: sensibilité au toucher, à la piqûre, à la chaleur et aux vibrations d’un diapason appliqué sur le dos du pied. La neuropathie entraîne une perte de sensibilité ou même une anesthésie complète.
- En recherchant les réflexes tendineux par le marteau à réflexes (abolis en cas de neuropathie).
- Par l’étude de vitesse de conduction.
Toute perte de sensibilité ou simple engourdissement des pieds doit constituer un signal d’alarme et faire rechercher une neuropathie afin de prévenir les complications possibles (maux perforants plantaires).

B – Neuropathie végétative
Elle est souvent associée à la neuropathie sensitive (mais pas toujours).
Elle se traduit par des dérèglements:
- Cardio-vasculaires: malaises ou passage de la position couchée à la position debout par chute de tension artérielle (hypotension orthostatique); plus rarement mauvaise adaptation du cœur à l’effort.
- Intestinaux: diarrhée surtout, parfois constipation ou alternance des deux, nausées, douleurs abdominales.
- Génito-urinaires: difficultés à uriner, parfois problèmes sexuels (en fait plus souvent d’origine psychologiques que liés à une neuropathie).
- D’autres symptômes peuvent être observés :
Au niveau de la peau notamment au niveau des extrémités des membres: sécheresse par perte de la sueur, chaleur anormale des orteils par dilatation anormale des artères.
Ou au niveau des os: fragilisation par perturbation de l’irrigation artérielle: cela aussi peut favoriser la survenue de maux perforant plantaires.

C – Formes motrices
Elles sont beaucoup plus rares. Le plus souvent il s’agit de faiblesse musculaire, d’atrophie des muscles des cuisses, d’un ou des deux côtés (amyotrophie diabétique par fonte musculaire). Ces formes régressent souvent en quelques mois.

D – Paralysie isolée d’un seul tronc nerveux
Le diabète peut aussi donner des paralysies d’un seul tronc nerveux qui s’installent souvent brutalement et régressent souvent en quelques semaines ou mois.
Les troncs nerveux les plus touchés sont :
● Le nerf facial: paralysie faciale d’un côté du visage (bouche de travers)
● Les nerfs qui commandent les muscles de l’œil: strabisme, vision double
● Le nerf crural: douleur de la cuisse, faiblesse à l’extension du genou
● Beaucoup d’autres troncs nerveux peuvent être touchés (nerfs thoraco-abdominaux, nerfs du bras, nerfs sciatique…) mais ces formes sont très rares.
A part le syndrome du canal carpien: compression d’un nerf fragilisé par le diabète, au niveau du poignet: picotements brûlures de la main et des doigts, surtout la nuit, le nerf est à «L’étroit» comprimé par les structures qui l’entourent (ligaments, tendons).

Vitesse de conduction
L’étude des vitesses de conduction des troncs nerveux peut confirmer la neuropathie ou révéler des formes débutantes, c’est à la fois un examen à visée diagnostique (préciser par exemple la cause des douleurs dans les jambes) et un examen qui permet de quantifier, de chiffrer précisément le degré de l’atteinte nerveuse (paramètre de surveillance du diabète).
Le principe est simple, chaque tronc nerveux est comparable à un câble miniature conduisant le courant électrique. L’influx nerveux est en effet, un influx électrique qui se déplace le long de ce câble pour gagner sa cible (par exemple un muscle).
Dans la neuropathie diabétique, les lésions des troncs nerveux entraînent un ralentissement de la propagation de l’influx nerveux et une diminution de l’intensité du courant transmis.
Pour tester les troncs nerveux, on applique à l’aide d’électrodes un courant de faible intensité
quelques dizaines de milli-ampères sur le tronc nerveux (là où il est juste sous la peau grâce à d’autres électrodes de recueil) placées quelques centimètres plus loin sur le même nerfs on enregistre le passage de l’influx électrique sous forme d’un potentiel électrique dont on peut mesurer le délai d’apparition (vitesse de propagation) et la grandeur (proportionnelle à l’intensité du courant transmis).
L’étude des vitesses de conduction chez le diabétique s’effectue le plus souvent au niveau des jambes et n’est pas longue (5 à 6 troncs nerveux suffisent). Parfois l’examen est complété au niveau des bras et des mains.

Traitement
Le traitement préventif est l’essentiel c’est le contrôle rigoureux des glycémies. Une fois la neuropathie installée, la bonne équilibration du diabète permet de faire régresser des signes (par exemple les douleurs).
Il n’y a pas de traitement médicamenteux spécifique de la neuropathie elle-même (mais des médicaments sont actuellement à l’essai).
La neuropathie installée il importe d’en limiter les conséquences par une surveillance attentive de l’état des pieds pour éviter les maux perforants plantaires.
Les douleurs lorsqu’elles sont rebelles peuvent réagir à certains médicaments agissant sur ce système nerveux (ex : Anafranil, Laroxyl, Tegretol).
Certains symptômes particuliers peuvent être traités (l’hypotension ortostatique par des bas de contention et des médicaments, le syndrome du canal carpien par une opération souvent efficace).

Conclusion
La prévention est essentielle dans la neuropathie diabétique: prévention de la neuropathie elle-même par le bon contrôle du diabète, prévention de ses conséquences par le dépistage précoce qui repose sur des notions simples (signaler des douleurs, des picotements ou une perte de sensibilité des pieds) et qui doit faire redoubler d’attention et de soins au diabétique.


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1 commentaires:

  1. j'ai des douleurs, parfois très contraignantes, dans les doigts et dans les membres (mains et pieds). Est-ce parallèle à une élévation de la glycémie ? Parfois, en la contrôlant, j'observe qu'elle est un peu élevée (1,70 à 2,00 g), mais ce n'est pas toujours le cas.
    Avec le traitement que je suis entrain de suivre, j'ai une glycémie satisfaisante dans l'ensemble, bien que parfois je me trouve dans des états d'hypoglycémie (même après avoir mangé) ???
    MERCI

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